La Liberté

Un Nadal impérial dans son jardin

L’Espagnol a battu Djokovic en finale et décroche son 13e titre à Paris. Son 20e en grand chelem

Publié le 12.10.2020

Temps de lecture estimé : 9 minutes

Roland-Garros » Rafael Nadal peut regarder Roger Federer droit dans les yeux. Le N°2 mondial a égalé le record du Bâlois en s’adjugeant avec la manière son 20e titre du grand chelem hier à Roland-Garros, où il a triomphé pour la 13e fois. Le gaucher majorquin s’est imposé 6-0 6-2 7-5 en 2 h 41 en finale devant le N°1 mondial Novak Djokovic, qui en reste donc à 17 trophées majeurs. Il a en outre atteint hier la barre des 100 matches gagnés sur la terre battue parisienne, où il a triomphé de 2005 à 2008, de 2010 à 2014 puis de 2017 à 2020.

Impérial durant une quinzaine où l’on pensait que son lift ferait moins de dégâts en raison du froid et de l’humidité, Rafael Nadal triomphe pour la quatrième fois sans perdre le moindre set à Roland-Garros. Avec 100 victoires, il y a obtenu plus de 10% de ses... 999 succès décrochés sur le circuit!

Moments importants

Le Majorquin a d’ailleurs refusé d’évoquer le fait qu’il avait égalé Roger Federer au nombre de titres majeurs. «Gagner ici veut tout dire à mes yeux. J’ai vécu les moments les plus importants de ma carrière ici. Aujourd’hui, je ne veux penser qu’à Roland-Garros, et pas à ces 20 titres du grand chelem», a-t-il expliqué sur le court. «Tu as montré pourquoi tu es le roi sur terre battue, je l’ai appris à mes dépens», lui a pour sa part lâché Novak Djokovic, battu pour la septième fois par l’Espagnol en huit duels livrés à Roland-Garros. «Je ne suis pas satisfait du jeu que j’ai produit, mais j’ai été dominé par plus fort que moi.»

Battu deux fois porte d’Auteuil (huitième de finale 2009 face à Robin Söderling, quart de finale 2015 face à Novak Djokovic) où il a en outre déclaré forfait avant son troisième tour en 2016, Rafael Nadal a donc bien fini par rattraper Roger Federer. Il a conquis quatre titres majeurs depuis le 20e fêté par le Bâlois en 2018 à Melbourne. Le gaucher majorquin, qui avait débloqué son compteur à Paris en 2005 soit près de deux ans après son éternel rival (Wimbledon 2003), s’est irrémédiablement rapproché depuis maintenant dix ans. Roger Federer comptait en effet 10 longueurs d’avance (16-6) lorsqu’il s’était imposé à l’Open d’Australie en 2010.

Fenêtre de tir étroite

Mais Rafael Nadal n’avait alors que 23 ans. Il n’avait pas encore donné sa pleine mesure à New York – ses quatre titres y ont été conquis entre 2010 et 2019 – et n’avait gagné «que» quatre fois à Paris où Roger Federer était tenant du trophée. Novak Djokovic n’avait lui que 22 ans, et ne tourmentait pas encore le Bâlois...

Rafael Nadal est désormais l’égal du plus grand joueur de tous les temps. Capable de gagner à Roland-Garros tant qu’il y prendra part, il pourrait bien y poursuivre sa moisson au printemps prochain. Roger Federer aura tout intérêt à être au sommet de sa forme en janvier à Mebourne, sa fenêtre de tir étant de plus en plus étroite. Le Bâlois (38 ans) avait égalé l’ancien record de Pete Sampras (14) en décrochant son unique succès à Roland-Garros. Il en était devenu le seul détenteur moins d’un mois plus tard, le 5 juillet 2009, en battant Andy Roddick 16-14 au cinquième set en finale à Wimbledon. Il doit désormais apprendre à partager. Mais pour combien de temps? ats

Résultats

Paris. Roland-Garros. Troisième levée du grand chelem 2020 (38 millions d’euros, terre battue). Finale du simple messieurs: Rafael Nadal (ESP/2) bat Novak Djokovic (SRB/1) 6-0 6-2 7-5. Finale du simple dames: Iga Swiatek (POL) bat Sofia Kenin (USA/4) 6-4 6-1. Finale du double messieurs: Kevin Krawietz/Andreas Mies (GER/8) battent Mate Pavic/Bruno Soares (CRO/BRA/7) 6-3 7-5. Finale du double dames: Timea Babos/Kristina Mladenovic (HUN/FRA/2) battent Alexa Guarachi/Desirae Krawczyk (CHI/USA/14) 6-4 7-5. Juniors. Finale du simple garçons: Dominic Stricker (SUI/7) bat Leandro Riedi (SUI/8) 6-2 6-4. Finale du double garçons: Flavio Cobolli/Dominic Stricker (ITA/SUI/3) battent Bruno Oliveira/Natan Rodrigues (BRA/8) 6-2 6-4.


COMMENTAIRE

Egalité, service Nadal

Dans les frimas parisiens qui devaient rendre sa balle inoffensive, Rafael Nadal a remporté hier son 13e titre à Roland-Garros, le 20e de l’Espagnol en grand chelem. Comme Roger Federer. Le chiffre est rond, la boucle bouclée. Dans un monde parfait, sans Covid-19 ni différence d’âge, on voudrait qu’elle ne se défasse jamais, tant les deux joueurs semblent unis devant l’histoire, qu’ils écrivent ensemble depuis 2004 et l’avènement d’un petit Majorquin dans les bourrasques du tournoi de Miami. Seize ans plus tard, le moment est venu de se poser la question qui fâche et qui divise: alors, c’est qui le plus grand?

Le débat durera au moins jusqu’au mois de janvier, date du prochain Open d’Australie, où Federer le convalescent effectuera son retour à la compétition. Et si la querelle des GOAT (pour greatest of all time) devait s’éterniser jusqu’à ce que l’un des deux batte en retraite, elle tournerait logiquement en faveur du plus jeune, car on ne voit pas un Nadal aussi fringant qu’hier quitter le circuit avant son aîné de cinq ans.

Egalité, service Nadal, à qui la loi du temps qui passe donne un avantage certain. Mais le tennis n’est pas qu’arithmétique. Il est aussi plaisir et émotions, terrain glissant sur lequel il est dangereux de s’aventurer sous peine de tomber dans de trop nombreux raccourcis. Non, Federer ne se résume pas à l’élégance et à la pureté du geste, comme Nadal n’est pas que ce combattant ultime qui court trop vite et trop longtemps. Ce serait oublier la patte gauche d’un garçon sensible qui a su faire évoluer son jeu avant de s’épuiser, et sous-estimer l’orgueil d’un Bâlois que le talent n’a pas empêché de beaucoup travailler.

Coup droit lasso contre revers coupé au couteau, ogre de l’ocre ou bouffeur de gazon, pêcheur cueilleur de Manacor et citadin rhénan exilé dans les montagnes grisonnes: la vie est faite d’antagonismes. Entre Federer et Nadal, l’opposition n’est que sportive, car le tennis les a réunis depuis longtemps. Pas de doute, le GOAT, c’est lui.

Pierre Salinas


Un premier sacre pour la jeune Iga Swiatek

Iga Swiatek est allée au bout de son rêve à Roland-Garros, décrochant à 19 ans son premier titre de grand chelem. La Polonaise s’est imposée 6-4 6-1 en finale face à la championne d’Australie Sofia Kenin, qui a souffert de la cuisse gauche au deuxième set. Classée au 54e rang mondial avant cette quinzaine, Iga Swiatek grimpera à la 17e place de la hiérarchie aujourd’hui. Elle offre surtout à la Pologne son premier trophée majeur en simple, hommes et femmes confondues, après avoir réussi l’exploit de remporter ses sept matches en deux sets. «Je ne sais pas ce qui se passe, je suis tellement heureuse, tellement contente que ma famille soit enfin là, c’est fou, je suis bouleversée. Il y a deux ans, je gagnais un grand chelem en juniors (Wimbledon 2018, ndlr), j’ai l’impression que c’est allé tellement vite…», a-t-elle déclaré avant de recevoir le trophée. Iga Swiatek (1 m 76) a su gérer au mieux ses émotions pour devenir la joueuse la moins bien classée à s’imposer à Roland-Garros depuis l’introduction des classements en 1975. Elle a tremblé au moment de conclure la manche initiale, manquant une balle de set sur son service à 5-3, mais n’a jamais cessé d’aller de l’avant. «Je voulais juste être agressive comme aux tours précédents», a-t-elle lâché. ats


Stricker gagne la finale 100% suisse

Le gaucher bernois a battu Leandro Riedi (6-2 6-4) et remporte le titre du simple garçons à la Porte d’Auteuil.

Dominic Stricker a remporté l’historique finale 100% suisse du simple garçons à Roland-Garros. Le gaucher bernois de 18 ans a dominé le Zurichois Leandro Riedi 6-2 6-4 en 61’de jeu. Classé au 10e rang du dernier classement ITF soit juste devant son adversaire malheureux, Dominic Stephan Stricker offre à la Suisse son 12e titre de grand chelem en simple chez les juniors. Martina Hingis en a remporté trois, Heinz Günthardt et Belinda Bencic deux, Roger Federer, Roman Valent, Stan Wawrinka et Rebeka Masarova un. Entraîné par Sven Swinnen, Dominic Stricker a nettement dominé les débats face à un Leandro Riedi bien trop crispé. Celui-ci ne s’est relâché qu’une fois dos au mur. Mené 6-2 3-1, le Zurichois a alors remporté trois jeux d’affilée pour prendre pour la première fois l’avantage (4-3).

Vainqueur du double juniors du dernier Open d’Australie (aux côtés du Roumain Nicholas Ionel), Leandro Riedi a toutefois une nouvelle fois craqué sur son engagement, sur le score de 4-4. Le protégé d’Yves Allegro a alors manqué deux balles de 5-4 à 40/15, avant d’offrir le break décisif à son adversaire. ats

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