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Pas simple de quitter le nid

Les jeunes semblent de moins en moins rapides à déserter l’habitat familial.

Quitter le cocon familial lorsque l’on est jeune peut s’annoncer plus ardu qu’imaginé. © Lara Bertholet
Quitter le cocon familial lorsque l’on est jeune peut s’annoncer plus ardu qu’imaginé. © Lara Bertholet

Lara Bertholet

Publié le 28.01.2023

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Mode de vie » A la veille de l’âge adulte, l’appel de l’indépendance vient parfois sonner le glas d’une adolescence aussi boutonneuse qu’électrisante. Symbolique dans la vie des jeunes, le fait de quitter le nid familial pour vivre seul peut se révéler plus complexe qu’il n’y paraît. Entre autonomie individuelle, attachement familial et nostalgie d’un temps sans responsabilité, comment les jeunes vivent-ils cette transition parfois abrupte? Regards croisés.

«La décohabitation se fait aujourd’hui de manière progressive, là où elle s’opérait avant simultanément avec les étapes symboliques du mariage ou du premier emploi».
Fabrice Plomb

Comme le souligne Fabrice Plomb, maître d’enseignement et de recherche en sociologie à l’Université de Fribourg, «la décohabitation se fait aujourd’hui de manière progressive, là où elle s’opérait avant simultanément avec les étapes symboliques du mariage ou du premier emploi». Par conséquent, l’allongement de la jeunesse, qui prédomine dans les parcours de vie actuels, s’illustre en Suisse par une volonté de quitter la maison vers 24-25 ans, au lieu de 20-21 ans dans les années 70-80, selon l’Office fédéral de la statistique (OFS).

Arrangements à façonner

Ce changement de quotidien s’inscrit pour Morgane, 19 ans, étudiante en psychologie, dans la conservation de ses attaches familiales. Bien qu’elle ait déménagé, elle avance ne pas se sentir adulte pour autant, malgré les formes d’indépendance qu’elle développe. Qu’il s’agisse de freins économiques ou sentimentaux, d’arrangements affectifs ou de nostalgie du dimanche soir, la décohabitation ne rime pas toujours avec simplicité pour ceux qui la vivent. Noémie, 19 ans et étudiante en lettres, confirme: «Quand je suis partie de chez moi, il a fallu trouver comment maintenir mes relations, puisque je ne faisais plus vraiment partie du quotidien. J’étais moins disponible et cela a pu créer des tensions avec ma famille.»

«Quand je suis partie de chez moi, il a fallu trouver comment maintenir mes relations...»
Noémie

En Suisse, les jeunes semblent rapidement encouragés à revendiquer leur autonomie, bien que l’obligation alimentaire à laquelle doivent répondre leurs parents s’étende jusqu’à 25 ans. Dans ce sens, le pays soutient d’une part un envol précoce, tout en le dissuadant financièrement d’une autre part, puisque la famille joue le rôle de soutien. Fabrice Plomb rappelle également l’incohérence d’une société qui promeut de plus en plus tôt l’autodéfinition et l’émancipation des individus, là où les jeunes restent soumis aux conditions économiques parentales qui permettent ou empêchent leur envol. En somme, ils sont amenés à davantage négocier leur départ avec eux-mêmes et avec leur famille qu’au siècle précédent, où l’on ne se posait pas forcément ces questions, puisque le mariage servait de raison légitime pour partir. Grâce à cette rupture progressive, les jeunes conservent certains avantages importants, tout en ayant la possibilité de goûter aux joies et aux déceptions de la vie adulte.

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